
Les eaux-de-vie de fruits sont à l’Est de la France, ce que le Cognac est à la Charente, le Calvados à la Normandie, le whisky à l’Ecosse. Elles doivent leur réputation à la finesse et à la variété de leurs arômes, ces derniers trouvant dans le climat et le sol de la Région des facteurs propices à leur épanouissement.
Hélas, il ne suffit pas que les arbres et les haies donnent de bons fruits pour que les distillateurs produisent de bonnes eaux-de-vie.
De la récolte des fruits à la mise au grenier des eaux-de-vie, les occasions sont nombreuses de gâcher le produit.
Comment préparer les moûts ?
Il y a deux manières différentes de préparer et de conditionner les fruits en vue de leur distillation, la macération d’une part et la fermentation d’autre part.
Mais quel que soit le procédé retenu, les conditions préalables à la production d’une eau-de-vie de qualité sont les mêmes : des fruits murs, sains et propres. Les fruits font leur plein d’arômes en achevant de mûrir. Enlever les feuilles, les débris de bois, les queues, la terre . . .
S’agissant de la famille des prunes (quetsches, mirabelles, prunes, reines-claudes) il faut abandonner la pratique qui consiste à ramasser et à mettre en fût tout ce qui tombe de l’arbre, Tiré du mélange de tous les fruits du verger, le tutti frutti décevra toujours les gourmets.
Ne sacrifions pas la qualité à la quantité.
Peu mais bon !
La distillation familiale est une occupation de loisir, une activité d’amateurs. Celui qui s’y adonne ne doit pas avoir le rendement comme premier souci.
C’est aussi une façon d’entretenir et de valoriser les vergers.


La macération
en distillation familiale
Les bouilleurs de cru ont le droit de procéder par macération. Deux conditions sont nécessaires : utiliser de l’alcool de leur propre production et d’autre part de faire une déclaration aux Services des Douanes. (Pas de taxation des fruits en
macération).
Un bouilleur de cru peut, par exemple, dans un premier temps distiller de la pomme (prendre une variété aux saveurs neutres, pas de Golden) puis l’année suivante, utiliser cet alcool obtenu pour y faire macérer de la framboise, fraise etc.
La fermentation
La fermentation a pour effet de transformer des matières organiques, qui sont d’une extrême complexité chimique, en composés plus simples.
Rien n’est plus facile que de faire fermenter des fruits. On les cueille et on les met dans un fût ; la nature fait le reste ; les fruits entrent spontanément en fermentation. Phénomène naturel la fermentation est due à l’action de microorganismes présents dans les fruits.
Ce sont des levures, des bactéries, des moisissures qui ont la propriété de se multiplier de façon vertigineuse . Ce qui est moins facile, c’est de s’assurer que le processus se développe dans des conditions les plus propices à la qualité de l’eau-de-vie.
Mesure du Ph :
La valeur du pH ou potentiel Hydrogène comme mesure du caractère acide des solutions aqueuses est importante dans la distillation des fruits et des baies pour deux raisons :
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l’activité des micro-organismes (levures et bactéries) est dépendante du pH et peut être ainsi développée ou interrompue par la variation du pH.
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il y a une relation entre le pH et la proportion d’acide libre ou combiné d’une solution.
La mesure du pH se fait au moyen de papier indicateur. Les indicateurs sont des matières colorantes qui changer de teinte selon la valeur de l’acidité de moûts.
L’échelle d’acidité des moûts est de 2.5 à 4.5. Le taux idéal est de 3.3.
L'acidification
Les jus et moûts de fruits présentent un milieu nutritif idéal pour beaucoup de micro-organismes à cause de leur teneur en sucres, acides aminés et matières minérales d’autant plus que la valeur moyenne du pH, située entre 3 et 4, ne peut avoir une action inhibitrice sur le développement des bactéries.
Par contre les levures se développent dans la zone de pH 2,8 et 3.Une acidification des moûts et à entreprendre pour des moûts peu acides mais surtout s’ils doivent être stockés plusieurs mois.
Des combinaisons d’acides de fruits sont produites par des fournisseurs industriels de la branche d’activité viticole et de l’œnologie.
L'enzymage
Lors de la désagrégation des fruits à pépins et à noyaux, la liquéfaction n’est pas toujours atteinte.
Pour améliorer cette liquéfaction l’utilisation d’enzymes pectolitiques (hydrolisant les pectines) est courante depuis des années.
Ces enzymes sont contenus dans les fruits, mais leur activité est bien souvent insuffisante.
Il existe 2 types d’enzymes pectiques :
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la polygalacturonase : elle casse les liaisons entre les éléments de construction de l’acide galacturonique de la pectine. A partir de grosses molécules, sont formées des plus petites, ceci conduit à la diminution de l’action liante.
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la pectine méthylesterase : elle sépare le méthanol (acide méthylique) des acides polygalacturonique méthoxylés.
Le méthanol est très toxique et passe dans le distillat lors de la distillation.
Avantages de la liquéfaction rapide des moûts :
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la formation d’un chapeau constitué de parties grossières de fruits est évitée ;
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des moûts épais (dus à une teneur en pectine élevée, par une utilisation de fruits verts ou séchés) sont rapidement désagrégés ;
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la répartition d’autres adjuvants dans le moût est facilitée ;
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la vitesses de fermentation est plus rapide ;
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la formation d’agglomérats est diminuée ;
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les noyaux se séparent de la chair ;
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les arômes sont libérés de la chair des fruits ;
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la distillation des moûts est plus aisée, la diminution de la durée de chauffe, empêche la caramélisation des purées.

Le levurage
La levure (saccharomyce cerevisiae) est un champignon hémiascomycète. Les principales levures utilisées pour la fermentation des fruits font toutes partie de cette espèce.
Le temps de génération des cellules de levure dans de bonnes conditions est d’environ de 80 minutes.
Au cours de sa vie, la levure va rencontrer diverses conditions auxquelles il faut qu’elle soit adaptée pour survivre, citons le froid, le chaud, la sécheresse, la carence et pour les levures présentes sur les fruits cultivés, les traitements antifongiques, (en particulier le sulfate de cuivre).
Dans des conditions naturelles, il est très difficile de savoir ce que la levure réclame pour croître de manière optimale.
La production des levures sèches granulées que l’on obtient sur le marché se fait dans des exploitations spécialement équipées.
Les levures pures multipliées sont lavées et, sans autre adjuvant séchées avec précaution (teneur en eau restante 8 %.
Par ce procédé, la granulation se forme d’elle-même. Le produit est emballé sous gaz de protection. L’activité de fermentation (teneur en cellules vivantes) et la pureté microbienne (absence d’organisme étranger) sont garanties par les contrôles de production.
Dans l’emballage d’origine fermé et avec un stockage au réfrigérateur, les levures sèches ne présentent pas de perte d’activité sensible durant une année.
Les emballages ouverts doivent être refermés immédiatement après un prélèvement de levure, leur conservation est cependant réduite.